Mythes et Légendes

par Mā  -  5 Octobre 2012, 15:35  -  #Textes

"Nous sommes faits de poussières d'étoiles »

Hubert Reeves

       

Nombre de cosmogonies se sont succédées ou ont coexisté au cours de l’histoire de l’Humanité. Chaque civilisation possède en effet ses propres systèmes de représentation, ses mythes fondateurs et les légendes de la création de son propre univers (connu, et généralement considéré comme Univers absolu…).

 

Pour les aborigènes d’Australie par exemple, c’est la pensée qui a créé la matière ; la terre, les hommes, les animaux et les plantes ne sont que des parties du même tout… Plus généralement dans la pensée orientale, la place de l'homme dans l'univers est celle d’un élément du grand tout. Ainsi au Japon, dans le shintoïsme, un cours d'eau, un astre, un personnage charismatique, une simple pierre ou même une notion abstraite peuvent être considérés comme des divinités. Différemment, l’Occident chrétien a pensé durant des siècles un monde « œuvre » du Dieu Créateur, lui-même séparé et extérieur à sa création : l’Homme est alors une créature à son image, destinée à régner sur les mondes animal, végétal et minéral. La mort de Dieu annoncée par Friedrich Nietzsche laisse alors l’homme orphelin, aux prises avec un monde purement matériel, privé de sa substance et de son étincelle divine. L’Homme est ainsi confronté au vide de « Sa » présence, et doit construire de nouveaux mythes pour expliquer sa place dans l’Univers.

 

Pourtant bien des civilisations ont envisagé la mort du Dieu originel comme condition sine qua non de la création du monde : les mythes de « bris de membre » où le corps du dieu démembré donne naissance aux différents éléments de l’univers suggèrent ainsi une continuité de substance, du Dieu originel à la matière-même du monde. L’Univers tout entier est alors pour ainsi dire le corps physique  du Dieu lui-même, et Dieu n’est autre que l’Univers tout entier. Dans une perspective eschatologique, chaque mort du Dieu laisse alors place à une nouvelle création, où, comme l’énonce Anaxagore de Clazomènes   dès le Vème siècle av. J-C, «rien ne naît ni ne périt, mais des choses déjà existantes se combinent, puis se séparent de nouveau».

 

Aujourd’hui les théories scientifiques fournissent à l’imaginaire populaire les éléments des grands mythes fondateurs de nos sociétés : le concept général du Big Bang, décrivant un Univers en expansion à partir d’une sorte de point d’origine de l’espace et du temps, très dense et très chaud… ; puis la grande « soupe » primordiale, le chaos originel dont s’extrait et où s’organise petit à petit la matière ; enfin la Théorie évolutionniste expliquant l’apparition de l’Homo Sapiens… Voici la cosmologie (naissance de l’univers) et la cosmogonie (naissance du monde) contemporaines, le récit scientifique et le mythe actualisé de la création de l’Univers.

 

Après un monde « théocentrique », puis « humanocentrique », la science décrit ainsi aujourd’hui un nouveau modèle vibratoire avec la physique quantique (dualité onde-corpuscule) et la Théorie des Cordes. Car toute matière a une nature ondulatoire ( Hypothèse de De Broglie, 1924) - ce que l’esprit humain, rationnel, cartésien et matérialiste ne peut appréhender que difficilement. C’est pourtant dans le dépassement de ce dualisme entre deux modèles de compréhension distincts et apparemment irréconciliables -  la matière considérée comme particule quantifiable, fractionnable et localisée, ou comme onde vibratoire continue, en expansion infinie et non localisée - que se situent peut-être le nouveau mythe et le mystère contemporain les plus féconds pour les générations à venir…

 

Dans le tableau/sculpture : « Mémoires du corps, poussières d’étoiles… », j’évoque à la fois l’origine commune de toute la matière de l’univers, et sa double nature corpusculaire et vibratoire…. Car notre corps est composé d’atomes qui se sont formés il y a  des milliards d’années et appartiennent à l’univers, à ses cycles de transformations permanentes. Notre corps de chair est à la fois cette enveloppe qui nous limite, nous sépare des autres, mais aussi qui nous relie au monde et nous immerge dans le cosmos 

 

Mā Thévenin

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